La matrescence, qu’est-ce que c’est ?

La matrescence, c’est le nom pour parler du processus de transition qu’on vit quand devient ou redevient mère.

Peut-être ce mot vous dit quelque chose grâce au podcast de Clémentine Sarlat La matrescence. Comme elle le dit dans l’introduction de chaque épisode « La matrescence est la contraction du mot maternité et adolescence qui définit la naissance d’une mère »

Mais ce terme reste assez méconnu dans le monde francophone. Alors, étudions le concept ensemble.

Origine du mot matrescence

Dana Raphaël, antropologue américaine invente ce mot en 1973. La grossesse, l’accouchement et le post-partum provoquent de nombreux changements…

L’arrivée d’un enfant est un chamboulement mais pas seulement dans la vie de la personne qui l’a mis au monde, aussi à l’intérieur de cette personne. Il y a ce que l’on peut appeler la naissance d’une mère : entre bouleversements hormonaux, restructuration psychique et question identitaire, c’est un processus complexe et bouleversant.

Alexandra Sacks, psychiatre américain a beaucoup contribué à faire connaitre ce phénomène notamment via ce ted-talk :
(en anglais mais sous-titres en français disponibles, en bas à droite via la petite bulle)


Matresence, ça te parle ?

Ce mot, au début, je ne l’aimais pas trop. C’est un mot-valise formé sur maternité et adolescence. Et j’avais l’impression que ça en rajoutait une couche sur l’infantilisation des mères.

Mais en fait, il ne s’agit pas de dire qu’il y a un retour à l’adolescence.

C’est juste que c’est une période de notre vie où nous faisons face à des changements hormonaux, physiques, psychologiques, émotionnels, cérébraux et identitaires. En cela, c’/est un bouleversement similaire à celui de l’adolescence. Et comme à l’adolescence, c’est souvent troublant. D’autant que la réalité est assez connue pour l’adolescence mais qu’on ne parle pas tellement de matrescence en société.

Photo de MamzelleJoe photographie, la mère floue sur cette photo, c’est moi en matrescence…

C’est un processus potentiellement déstabilisant, qui peut rendre vulnérable. On ne le vit pas toutes de la même manière. C’est plus ou moins intense, plus ou moins ressenti. Mais transformation(s) il y a.

La matrescence, seulement pour la personne qui a porté et mis au monde le bébé ?

C’est quelque chose qui est en partie lié au fait de porter et mettre au monde un enfant mais pas seulement. Les études montrent que les parents qui n’ont pas porté et enfanté leur enfant ont aussi des modifications des zones d’activité de leur cerveau, des changements dans leur production d’hormones (notamment une baisse de testostérone). Il y a donc aussi des patrescences et on peut aussi dire des parentescence – mais c’est encore moins étudié que les matrescences (entendu dans le sens de ce qui concerne la personne qui a mis au monde l’enfant)…

Des études ont commencé à montrer qu’il semblerait que certains changements cérébraux soient liés à l’idée de devenir parent et d’autres dus à la situation de s’occuper intensément d’un enfant, plus qu’au fait de l’avoir ou non porter. Mais les recherches autour des cerveaux des parents n’en sont encore qu’à leur balbutiement.

Si tu souhaites un état des lieux scientifiques de la recherche à ce sujet, je ne peux que recommander le livre de Mommy Brain, Découvrez les fabuleux pouvoirs du cerveau des mères ! De Dr Jodi PAWLUSKI.

(Dans cet article et dans mon approche d’accompagnement des parents, j’essaie d’être la plus inclusive possible, c’est important pour moi. C’est pour cela que je parle de « personne qui a mis au monde l’enfant » et que j’ajoute le nouveau mot-valise « parentescence » car à chacun-e de se définir comme mère, père ou parent suivant son identité de genre).

Ce qui est important à retenir du concept de matrescence / patrescence / parentescence, c’est qu’il une réelle transition vers la maternité / paternité / parentalité qui provoque des changements à plein de niveaux qui sont juste normaux.

Mieux comprendre, faire connaitre et prendre en compte cette réalité aurait un énorme impact positif sur nos expériences de parents mais aussi par ricochet, sur nos vies sociales, notre travail, la société toute entière.

Ça dure combien de temps ?

Cela est très variable. Pour ce qui est des changements cérébraux, la restructuration peut mettre des mois, voir des années à se stabiliser.

Anna Roy, sage-femme et autrice dit « le post-partum dure 3 ans » (le post-partum étant la période après l’accouchement).

Suivant ton histoire, ton accouchement, comment se tisse le lien avec le bébé, la difficulté ou la fluidité de cette période, la matrescence se fera différemment.

C’est si terrible que ça, la matrescence ?

On parle souvent de cette période en termes de perte : perte de repères, perte de mémoire, perte de connexion avec l’entourage « qui ne comprend pas ».

Et la libération de la parole autour des difficultés du post-partum peut donner une image noire.

Mais il y a autant d’histoire de matrescences (et parentescence) que de personnes.

Et puis, il n’y a pas que des pertes. Naitre parent, c’est développer une nouvelle organisation et de nouvelles compétences.

On peut citer plusieurs super pouvoirs que cela nous permet de développer :

  • Au niveau des recherches sur le cerveau, il a été montré que l’attachement au bébé facilité par le les circuits de récompenses activées pour de nombreux parents et cela développe les zones de l’empathie. D’ailleurs, il y a une plus grande sensibilité aux expressions émotionnelles non-verbales qui se développe (et cela possiblement dès la grossesse). Un bel outil pour nos relations avec les autres, non ?
  • En devenant parent et surtout en s’occupant intensément d’un bébé, on peut développer nombreux soft skills intéressants pour la vie générale mais aussi la vie professionnelle : capacité à jongler, résistance au stress, apprendre que l’erreur fait partie du processus d’apprentissage, capacité à faire face à l’imprévu et à se réorganiser. L’apprentissage ne se fait pas toujours avec fluidité mais ensuite on peut s’en servir ailleurs.
  • Devenir parent, c’est aussi potentiellement revoir ses priorités (parce qu’on ne peut pas tout faire), apprendre à (se) protéger et à dire non.

Ce qui est peut-être potentiellement « terrible », c’est le fait qu’on perde ses repères, qu’on ne se reconnaisse plus, qu’on doive réorganiser sa vie et réapprendre à se connaitre et à fonctionner alors qu’il faut aussi apprendre à s’occuper d’un enfant et se remettre des secousses physiques et psychiques d’une grossesse, d’un accouchement, d’un post-partum et sans le réseau de soutien et d’aide qui pour moi devrait entourer les jeunes parents.

Et si on parlait autant des changements possibles de la matrescence que de ceux de l’adolescence, il n’y aurait pas en plus l’effet de surprise qui peut être assez déconcertant.

Tu as peut-être remarquer que je mets beaucoup de « peut-être » de « potentiellement » et autre nuances de ce type.
Car oui, il y a des schémas qu’on retrouve de manière assez courante mais en fonction de l’environnement, de l’histoire, de l’entourage, de la sensibilité de chacun·e, la période et ses conséquences peuvent être vécues très différemment.

La matrescence comme l’adolescence peut aussi être relativement fluide et douce.

Et les émotions dans tous ça ?

Avant et après la naissance, on vit souvent une grande sensibilité émotionnelle qui s’accompagne de difficultés à cacher les manifestations.

Concrètement, ça peut vouloir dire : pleurer devant une affiche du métro pour la SPA ou éclater de rire en pleine réunion.

Différent·e·s chercheur·e·s ont exploré cette vulnérabilité. D. Winnicott, notamment parle de « préoccupation maternelle primaire ». C’est un état psychique où on devient hypersensible pour s’adapter aux besoins intenses et délicat du nouveau-né. Le but premier étant la survie de l’espèce.

À cela s’ajoute la fatigue qui nous rend plus sensible. Et puis le fait que s’occuper d’un bébé, puis d’un petit enfant, c’est potentiellement faire face à énormément d’émotions intenses : Colère, peur, frustration, abattement, stress mais aussi amour, joie, excitation… Tout y passe ! Je dis souvent moi-même que j’ai réalisé avoir un problème avec l’expression de ma colère quand j’ai eu des enfants !

Face à l’intensité de la vie de mère, de parent à charge, face à l’intensité de ce qui se passe en soi, on peut se sentir démuni·e. 

Et puis, donc, on a moins de barrière face à ce que l’on ressent. On se le prend plus en pleine face.

La matrescence, ça peut être un sentiment que tout tangue. Que ce qui était stable (notre identité, notre façon de fonctionner, notre rapport de couple, l’organisation de notre quotidien, notre connaissance de notre corps…) a disparu… Et en plus, on n’a plus les mêmes capacités de « gérer » ses émotions.

Alors, en vrai, les émotions ont toujours été là, c’est juste qu’en temps normal, dans nos sociétés, on a appris à les ignorer, les mettre sous le tapis. Et la matrescence, c’est souvent « allez, hop, y a plus de tapis », il n’y a pas d’autres choses que de vivre ses émotions pleinement.

Par contre, il y a le choix d’apprendre à mieux les vivre. On peut accueillir et comprendre ses émotions, et on peut travailler sur comment elles s’expriment et ce qu’on en fait.

C’est le but de mon travail de t’aider à le faire.

Je dis souvent que la grossesse, le post-partum, la matrescence et en général la parentalité, c’est une fenêtre d’opportunités pour changer notre rapport aux émotions. Comme d’un coup, ce qu’on a toujours fait ne fonctionne plus ou mal, c’est le moment pour changer de paradigme !

Oui, mieux vivre ses émotions est un super pouvoir !

Si tu veux le découvrir, je te propose de partir avec moi en exploration émotionnelle.

Après, on n’apprend pas à nager quand on se noie !

Si tu es enceinte ou que tu viens d’accoucher et que tu as tapé « matrescence » sur Google, je crois que le plus urgent, c’est de normaliser ce que tu ressens et ce que tu vas potentiellement vivre. Pour cela, tu es la bienvenue dans mon groupe prénatal (si tu es enceinte) ou mon groupe postnatal (si tu as eu un bébé il y a quelques jours, semaines, mois).

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