Dernièrement, en faisant le tri des livres de mes enfants, j’ai partagé mes préférés sur Instragram. Et j’ai eu beaucoup de conversations passionnantes qui s’en sont suivies. Ça m’a donné l’idée de cet article où je ne vais pas te partager nos livres préférés mais plutôt utiliser nos livres préférés pour t’expliquer comment j’utilise les livres pour aborder les émotions d’un point de vue d’adulte.
Crédit photo (libre de droit) : StockSnap / pixabay
Aujourd’hui, on parle de plus en plus de matériel pour parler des émotions aux enfants. Et je trouve ça super. Mais on se focalise beaucoup sur les émotions des enfants. Or, les enfants apprennent avant tout par l’exemple, et leur premier exemple, c’est leurs parents. Donc pour moi, il est important pour nous adultes de pouvoir mettre des mots, expliquer nos propres émotions. C’est bon pour nos enfants, et puis c’est bon pour nous !
Parler de l’amour parental…
Les livres qui parlent de l’amour parental, il y a pas mal… Ma fille et moi aimons beaucoup Mon Amour de Astrid Desbordes. Il prend le point de vue de la maman, c’est une mise en lumière de ce qu’un parent ressent en amour inconditionnel, tout en montrant l’arc-en-ciel des moments de la vie. Le texte est court, il laisse l’opportunité de commenter, c’est ce que l’on fait beaucoup.
Sur cette double page, on va commenter les émotions de la maman et d’Archibald : « ils ont l’air heureux », « elle a l’air en colère, il a l’air triste ». Puis les circonstances pour essayer de comprendre ce qui peut provoquer ces émotions : le plaisir de faire plaisir pour la maman à gauche ; à droite, la colère pour la maman, la tristesse et le regret pour Archibald ? Et on en profite très souvent pour faire des parallèles avec des moments de notre vie. C’est l’occasion d’explorer ce qu’on a pu ressentir quand on n’est plus dans la tempête émotionnelle ni l’une ni l’autre.
Même thème de l’amour mais pour les plus petits et clairement focalisé sur ce que cet amour fait à l’enfant : Petit amour de Nadine Brun-Cosme. Le fait qu’on est dans ce qui fait du bien à l’enfant, n’empêche d’amener l’enfant sur les expressions de visage des parents et ce qu’ils peuvent ressentir de donner cet amour.
Ici, ça peut être simplement une phrase disant « oh regarde, ils ont l’air contents, tu sais, c’est un grand bonheur de parents d’aimer ces enfants. Et tu sais que je t’aime quoi qu’il arrive ? »
Sur le même thème, on aime aussi beaucoup : Je t’aime, petit coquin ! de Camille Chincolle (pour les tout petits), Je t’aimerais toujours quoi qu’il arrive de Debi Gliori.
S’appuyer sur les illustrations pour parler de ce que ressent aussi l’adulte
Peu de livres parlent explicitement des émotions des parents mais généralement, l’illustration les montre, il suffit donc de verbaliser.
Ma fille (3,5 ans) adore qu’on discute de cela. Et ce n’est pas toujours évident, ça permet de faire des suppositions tout en prenant conscience que les émotions, elles sont personnelles tout comme leur expression. Et tant qu’on ne dit pas, on ne peut pas être sûre.
Dans Le magasin de mon père de Satomi Ichikawa, le papa range ses tapis avec son fils qui en trouve un avec un trou qui l’intéresse. Le texte dit simplement : « »s’il-te-plait, papa, donne-le-moi » / « bon, puisque personne ne le veut, je te le donne. »
Alors, est-ce que le papa est surpris ? Étonné ? Ou incertain de quoi faire ? Il hésite ? Ou il cherche à comprendre la question ? Et tu crois qu’il est fier que son fils s’intéresse à ses tapis ?
(Au passage, j’en profite pour te conseiller un autre livre de cet auteur-illustrateur La fête à la tomate qui a un grand succès ici)
S’appuyer sur le texte pour en déduire les émotions
Nous sommes dans une société où on ne nomme pas beaucoup les émotions en tant que telles. Mais il y a souvent des éléments qui permettent de déduire.
Mes enfants sont abonnés à Pomme d’Api. J’apprécie beaucoup car ça leur donne accès au fil de l’année à des éléments culturels français que nous n’avons pas forcément ici (j’habite aux Pays-Bas) ou pas de la même façon : noël, chandeleur, carnaval, poisson d’avril, etc. (en plus de me rappeler mon enfance à moi). J’ai particulièrement un coup de cœur pour les histoires de La famille Noé, qui montre une famille drôle, pleine de créativité et de complicité.
Dans cet extrait, le papa rougit, l’occasion pour moi d’évoquer le fait de se sentir mal à l’aise, est-ce que c’est de la honte, du regret ?
Faire un parallèle avec des situations de la vie de l’enfant
Quand il y a une tempête émotionnelle, que l’enfant pleure, crie, est triste, en colère ou a peur, il est tout à ses émotions et ne peut pas penser à ce que l’adulte dit ou ressent. Mais quand il est en situation de sécurité émotionnelle, l’empathie est déjà présente dès très petit et on peut la développer !
Mettre des mots sur les émotions dans des moment où l’enfant est capable de l’entendre et l’adulte peut l’expliquer peut vraiment entrainer cette compétence du côté de l’enfant. Mais aussi de nous adultes : si on prend l’habitude de parler des émotions en situation non critiques, il sera sans doute plus facile de le faire en situation critique !
Mes deux enfants adorent Tintamarre et gazoullis de Eva Montanari, notamment parce qu’on y fait des bruits mais aussi parce qu’il évoque rapidement la difficulté de se séparer le matin pour aller à la crèche.
Mon fils (21 mois) trouve cette séparation difficile, c’est pourquoi, j’aime particulièrement commenter ce passage, je peux faire le parallèle avec ce que mon fils ressent : c’est difficile, le petit crocodile est triste que sa maman parte, peut-être qu’il a un peu peur… Et puis après, avec un câlin de l’éléphant puis en jouant avec ses copains, ça va mieux… Mais aussi montrer que la maman est touchée par la situation. c’est difficile de voir son enfant être triste, on aimerait pouvoir rassurer et consoler toujours son enfant, mais ce n’est pas toujours possible…
Parler de la complexité des émotions
Tu peux le voir dans les exemples que je ne mets pas forcément des étiquettes uniques sur les émotions. La vie c’est toujours plus nuancé que ça. Et si j’aime bien aborder les émotions simples avec les enfants avec les livres comme Grosse colère ou La couleur des émotions, je n’ai pas peur de commencer tôt à parler de la complexité de ce que l’on ressent. Les enfants en font déjà l’expérience, quand ils sont par exemple excités d’une perspective tout en ayant un peu peur de la nouveauté.
Dernièrement, ma fille a voulu qu’on lui lise Kiki la petite sorcière, même si c’est un peu difficile au niveau narration pour âge. On l’a d’abord lui en épisodes, sans vraiment commenter, difficile de savoir ce qu’elle a compris – mais la lecture juste pour le plaisir d’entendre tinter les mots est importante aussi…
Mais elle a voulu le reprendre et commenter les illustrations ensemble.
Ici, Kiki a 13 ans et quitte ses parents, ses voisins pour un voyage initiatique. Ce que ressentent les adultes, c’est un mélange de fierté, de peur… Il est probable que ma fille de 3,5 ans ne comprenne pas encore bien cela. D’ailleurs dans son utilisation du mot fière, elle se trompe parfois avec contente, heureuse. Mais c’est à force de lui donner des exemples et des explications que cela deviendra concret.
Cet article, il est un peu différent dans le sens où il peut sembler tourner vers l’éducation des enfants aux émotions. Et en effet, j’espère que ça te donne des pistes pour parler des émotions avec tes enfants… Mais aussi que ça te donne l’occasion à toi de réfléchir aux émotions, à leur expression.
Notre génération n’a pas grandi en mettant des mots précis sur les émotions et même, c’est un apprentissage de toute une vie que d’apprendre à lire ce qui se passe en nous. Et les livres pour enfants, je les aime tellement moi que je les lisais avant même d’en avoir.
Bref, cet article, j’espère qu’il peut servir au delà de la parentalité. Parce que les émotions, c’est important d’abord pour soi !
Et si jamais tu te sens complétement perdu-e avec les tiennes, je t’invite à découvrir mes ateliers d’exploration émotionnelle ou l’accompagnement individuel.