Cet article a été publié pour la première fois en juin 2015, bien avant que j’offre l’exploration émotionnelle. J’ai décidé de republier ces chroniques sur ce site car elles sont précieuses pour moi, elles peuvent aussi inspirer d’autres futur·e·s marié·e·s. Et puis, il y a dans ces écrits-là déjà le partage de mon cheminement autour des émotions.
Je laisse donc la parole à Claire jeune mariée…
« Les photos, c’est tout ce qui reste ».
Cette phrase, tu l’as peut-être entendue, lue ou pensée.
Mais voilà, moi, cette phrase, elle m’énerve au plus haut point !
Pourquoi ? Parce que j’ai l’impression qu’on met la pression aux futures mariées avec ça. Limite : si tu n’as pas les moyens de t’offrir un photographe, ben, ton mariage est foutu, tu n’en retiendras rien. J’ai l’impression que ça peut faire culpabiliser grave la pauvre future mariée (toi ?) qui n’a décidément pas les moyens de mettre 1000€ pour des images.
(Mais oui, oui, j’ai tout à fait conscience que les photographes ne se font pas de l’argent sur notre dos, et que leur travail est bien supérieur à celui d’un amateur. D’ailleurs, à mon mariage, j’ai fait venir une photographe de Lille et j’ai même pris un vidéaste.)
Mais surtout, pour moi, cette phrase est fausse. Non, les photos ne sont pas tout ce qui reste.
Reprenons.
Crédits photo (creative commons) : Garry Knight
Non au diktat de l’image parfaite
Tu te demandes peut-être d’où me vient cette réflexion – c’est vrai, j’ai payé un photographe et un vidéaste pro, j’en suis super contente et je regrette même un peu de ne pas les avoir fait venir au mariage civil. Je devrais plutôt défendre l’autre camp. Mais non, cette pression sur les images, elle me fait mal au cœur.
Parce que j’ai réalisé, il y a quelques mois, à quel point elle était ancrée dans la représentation du mariage qu’on nous donne sur le net.
Retour en arrière :
J’avais fait une sélection de mes 5 photos préférées de mon mariage civil pour une publication de Mademoiselle Dentelle sur Yahoo pour Elles. Ce sont des photos d’amateurs donc car nous n’avions pas de pro pour le mariage civil. Et quelqu’un avait commenté sur Facebook avec quelque chose du style « C’est une parodie ? ». Et sa remarque avait reçu quelques « J’aime ».
Après avoir échangé avec cette personne (parce que même si la réflexion m’avait touchée, je souhaite toujours essayer de comprendre avant de juger), je me suis rendue compte qu’elle pensait « au regard de la qualité des photos » que ça ne pouvait pas être mes photos préférées de mon mariage !
Et là, je me suis dit « mais comment en est-on arrivé là ? »
Comment ça se fait qu’on croit que ça ne puisse pas être mes photos préférées de mon mariage ? Depuis quand la qualité technique et artistique des images est une qualité fondamentale pour juger de la véracité des souvenirs d’un mariage ? Pourquoi ne peut-on pas imaginer que ces images me rappellent des moments heureux et que c’est pour ça que je les chéries ?
J’ai ma petite idée sur l’origine du problème : aujourd’hui, je connais peu de blogs qui publient des photos de mariage prises par des amateurs. Mais je ne jette pas la pierre aux blogueuses, je comprends que, dans notre monde aujourd’hui, l’image étant ce qui attire les gens, il vaut mieux publier des photos techniquement et esthétiquement parfaites.
Mais voilà, j’ai envie de rappeler que ce n’est pas ça qui fait la beauté des souvenirs.
Bien sûr, avoir des images où tu te trouves belle (je m’aime bien plus sur les photos de ma photographe que sur celles des invités), des images des émotions fugaces (que seul un pro saura capturer), des images des jolis détails (qui te rappellent les nombreuses heures à rêver de ton mariage), ça nourrit parfaitement les souvenirs et ça peut aider à faire passer le wedding-blues…
Mais je doute que ton attachement à cette journée dépendra de la qualité des photos !
Non au diktat de l’image comme unique souvenir
Parce que tu sais, l’expérience, ça ne se capture pas.
La beauté ressentie non plus d’ailleurs.
Une image, c’est toujours une représentation de quelque chose. C’est un point de vue. C’est le regard de la personne sur l’événement. C’est précieux bien sûr, parce que ça nous permet de nous re-projeter dans le jour J et aussi de découvrir ou re-découvrir des moments.
Une partie de mes souvenirs de mon goûter d’honneur est aujourd’hui formée par ce que j’ai vu en photos et en vidéo parce que j’ai malheureusement beaucoup oublié de ces moments-là.
Mais, parfois aussi, l’image clashe avec les souvenirs. À la sortie de l’église, j’avais l’impression d’être lessivée et un peu perdue. Sur les photos, on me voit souriante et rayonnante… Je ne voudrais pas que ce que l’image a figé me fasse oublier mes sensations du moment, infiniment précieuses car révélatrices du chamboulement provoqué par cette cérémonie.
Tout ça pour dire que proclamer qu’il faut des photos pour garder des souvenirs, c’est prendre le risque de ne pas réaliser que ces images ne nous fourniront qu’une aide à nos souvenirs et qu’on peut construire sa mémoire autrement.
Il y a des dizaines de petits moments de mon mariage qui n’ont pas été mis en boite et qui sont très chers à ma mémoire :
- Au mariage civil, le chemin à vélo avec l’Amoureux pour arriver à la mairie, la larme partagée avec ma petite sœur à la fin de la cérémonie (que nous sommes les deux seules à avoir vue), le concert de sonnettes, mon frère qui me met à l’eau en criant « vive la mariée »…
- Au mariage religieux, l’attente sous le parapluie, le convoi de voitures et sa douceur, la folie du soir, la marche dans la nuit…
Il y a les souvenirs des autres, qu’ils m’apportent comme des cadeaux parce qu’eux aussi ont posé leur regard sur le mariage… Ils ne se rappellent pas forcément des mêmes moments que moi. Ils ont vécu des choses que je n’ai pas vécues mais dont je suis heureuse de connaître l’existence (c’est toujours un merveilleux présent de se rendre compte que tes proches ont partagé un moment de complicité autour de ton mariage).
Il y a ceux qui me reviennent sans être convoqués : la playlist qui passe une chanson qui me ramène immédiatement à ce jour-là, la recette de cuisine qui sera pour toujours associée à ce repas-là, les bijoux que je remets à l’occasion et toujours avec le sourire du souvenir…
Autant de madeleines de Proust pour se rappeler au détour d’un instant.
Bref, les souvenirs, c’est bien plus profond qu’une série de photos (ou une vidéo d’ailleurs).
Comment faire pour que les souvenirs restent ?
Mais tu te dis peut-être : c’est vrai mais comment être sûre que ce type de souvenirs restera, que le temps ne les usera pas, ne les transformera pas pour finir oubliés à jamais ?
Les souvenirs, tu peux les faire vivre en en parlant. Tu as peut-être peur de souler tout le monde encore après le mariage mais j’ai remarqué que ce sont souvent les invités qui en reparlent spontanément. Il suffit de se glisser dans la brèche pour revivre ensemble cette belle journée. Et puis, mon mari tout neuf, il a aussi les yeux qui pétillent quand on se rappelle ensemble ces jolis jours ; alors avec lui, pas la peine de se restreindre.
Mais bien-sûr, avec le temps, les paroles s’envolent… Et les images se font floues dans nos têtes…
Pourquoi ne pas coucher tes souvenirs par écrit ?
Si je n’avais pas été chroniqueuse, j’aurais sans doute fait un petit cahier à tenir au fil des préparatifs et à remplir après le mariage pour coucher sur le papier tout ce qu’on a vécu (ou ce que j’arrivais à en dire en tout cas). Pas besoin d’avoir des grands talents d’écrivain pour ça. Le but n’est pas de publier le prochain best-seller mais de garder pour toi des traces de ce que tu as vécu, ressenti…
Ce qui reste, avant tout, c’est votre union
Après, il faut aussi accepter que le temps passe, que c’était une expérience unique qu’on ne peut pas revivre (tu peux renouveler tes vœux mais tu ne revivras jamais la même journée). Il faut accepter que la vie suit son cours et qu’on oublie au fur et à mesure les petits détails…
Mais c’est pour laisser de la place au présent, à tous les merveilleux moments qui sont encore à vivre !
Parce que ce qui restera de cette journée spéciale, c’est votre mariage. Les promesses qui sellent votre union, l’amour à fructifier chaque jour, l’envie de faire la route à deux coûte que coûte.
Après tout, c’est avant tout pour que ça qu’on se marie, non ?
Voilà, dans cet article, je ne voulais pas nier l’importance que peut représenter les photos de mariage (je chéris tellement les miennes, même celles un peu ratées esthétiquement d’amateurs), je ne voulais pas non plus te dire : « ne prends pas de photographe pro, ça n’en vaut pas la peine » (avoir craqué pour photographe et vidéaste pro est une décision que je ne regrette absolument pas !).
Mais je voulais te faire part de ma réflexion. Pour que tu ne te mettes pas trop la pression non plus sur cette histoire d’images (si tu as le budget pour et que c’est important pour toi, je ne peux que te conseiller de prendre un photographe mais, sinon, ça ne veut pas dire que tu ne garderas pas de bons souvenirs de ton mariage).
Et aussi et avant tout, pour remettre les choses en perspectives : d’abord, avant de revivre les souvenirs du jour J, il faut essayer de vivre à fond la journée. Et puis, après, le plus important, je pense, c’est quand même de bien vivre son mariage au sens large, son union au quotidien, jour après jour.
Donc non, les photos ce n’est pas tout ce qui me reste. Loin de là. Et c’est tant mieux !
Et toi, qu’est-ce que tu en penses ? As-tu fait appel à un photographe / vidéaste pour immortaliser les images de ton mariage ? Si tu es déjà mariée, comment gardes-tu les souvenirs de celui-ci ? Raconte-moi…
[…] des petits détails, être un peu triste que ce soit fini après, mais surtout pouvoir se rappeler que c’était une journée merveilleuse, pour la belle union […]